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Incinération à Kandahar : des conséquences pour la santé ?

16/04/2019

Aujourd’hui, les médias font état de risques sanitaires probables encourus par les soldats belges à l'aéroport de Kandahar, en Afghanistan.

Pour rappel, près de 2.000 militaires belges ont stationné à Kandahar, entre septembre 2008 et octobre 2014, dans le cadre de l’opération Guardian Falcon. Au cours de cette mission, nos F-16 assuraient le soutien aérien des troupes de l’OTAN déployées sur le terrain, sous les ordres de l’ISAF (International Security Assistance Force).

Jusqu’à la fin 2012, tous les déchets générés à Kandahar – déchets ménagers, mais aussi des batteries de voiture, des huiles, des plastiques, des déchets chimiques et médicaux, du polystyrène expansé ainsi que des excréments – étaient brûlés à l’air libre dans une « fosse à feu ». Jusqu’à 100 tonnes de déchets par jour. Ce qui a donné lieu à une énorme puanteur et à des fumées, également chez les Belges qui se trouvaient sur place. Apparemment, les émanations contenaient des substances toxiques pouvant causer des troubles pulmonaires et respiratoires, y compris le cancer.

À ce sujet, le syndicat militaire ACMP-CGPM se pose un certain nombre de questions :

  • Pourquoi la Défense a-t-elle attendu plus de deux ans et demi après le début de la mission pour effectuer des mesures de la qualité de l’air, soit en avril 2011 ? Dès le début du déploiement et devant une telle pollution, assez de militaires belges avaient pourtant tiré la sonnette d’alarme auprès de leur hiérarchie. En 2010, l’ACMP-CGPM était déjà intervenu auprès de l’autorité à ce sujet. Mais l’état-major n’a apporté aucune réponse tangible et aucune enquête approfondie n’a été menée. Nous avions été « rassurés » sur base de ce qui semble être, aujourd’hui, une interprétation très créative des normes d’exposition.
    En outre, il y avait d’autres indications à considérer pour prendre cette affaire au sérieux. L’armée américaine avait mené, entre autres, des études scientifiques qui, dès 2007, établissaient un lien manifeste entre ces pratiques d’incinération et les problèmes pulmonaires et respiratoires chez les soldats, après leur mission en Afghanistan et en Irak.
  • À la suite de ces découvertes scientifiques et de l’échange d’informations au sein de l’OTAN, pourquoi la Belgique n’a-t-elle pas appliqué le principe de précaution ? Par exemple, en créant un registre des militaires exposés à la fosse à feu. Ceci pour qu’ils soient examinés régulièrement. Non, rien n’a été fait. Il n’y a donc pas eu de suivi spécifique pour les intéressés au cours des examens médicaux périodiques, ce qui aurait pu être la moindre des choses.

  • Quelle est la valeur de la mesure de la qualité de l’air effectuée à Kandahar, entre la fin avril et le début mai 2011 ? Répond-elle aux standards scientifiques qui s’imposent ? Sommes-nous certains que les conclusions, à savoir qu’il n’existe aucun risque significatif pour la santé du personnel, soient correctes ? D’après les professeurs d’université, la Défense peut exprimer des doutes quant à cette étude.

En application de notre droit à l’information, le syndicat militaire ACMP-CGPM demande, à ce sujet, des explications à l’état-major de la Défense : comment s’est déroulée l’étude sur la qualité de l’air en 2011 ? Pourquoi celle-ci a-t-elle eu lieu seulement après deux ans et demi ? Quels sont les résultats des analyses de la médecine du travail auprès des militaires concernés ? Des contrôles spécifiques ont-ils été effectués et les intéressés ont-ils été spécialement surveillés ? Entre-temps, quelles actions de suivi la Défense a-t-elle prises ?

Ajoutons que l’ACMP-CGPM demande à la Défense la mise en place urgente d’une cellule auprès de laquelle les militaires de Kandahar peuvent faire part de leurs problèmes de santé. Il existe, après tout, des indications scientifiques sérieuses indiquant un lien entre l’exposition à des fumées issues d’une fosse à feu et certaines maladies pulmonaires et cardiovasculaires. Un tel registre existe déjà aux États-Unis, ainsi qu’aux Pays-Bas où des dizaines de militaires malades se sont manifestés, pour la période écoulée, auprès du ministère de la Défense.

En attendant la création de cette (possible) cellule d’assistance, nous demandons à nos membres qui ont effectué une période à Kandahar et qui se plaignent de problèmes pulmonaires et respiratoires, de se manifester auprès du Secrétariat permanent de l’ACMP-CGPM. Pour ce faire, ils doivent envoyer un courriel intitulé « Burn pit » à l’adresse srt@acmp-cgpm.be, en y indiquant les nom, prénom, numéro de matricule, période(e) de la/des mission(s) à Kandahar et une courte description des problèmes médicaux rencontrés.

Nous recommandons aussi aux militaires qui ont été en mission à Kandahar et qui souffrent des maladies mentionnées plus haut d’en faire part au médecin du travail de leur unité, afin que leurs droits à d’éventuelles indemnités soient préservés.


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