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La Défense au point mort?

13/11/2014

Nous savons, entre-temps, que la Défense devra s’attendre, au cours des prochaines années, à plus d’économies que prévu ! L’ancien Chef de la Défense, Charles-Henri Delcour, dénonce cette politique dans une lettre ouverte.

L’ACMP-CGPM, le syndicat militaire reprend intégralement cette lettre en ne se faisant qu’une seule réflexion : “Le gouvernement actuel peut-il donner tort à l’ancien Chef de la Défense, pour ce qui concerne son analyse?”

 

Traduction libre

 

Savoir si la Défense va passer au point mort n’est pas, à mon avis, la bonne question. L’Armée exécutera une fois de plus, avec loyauté, ce qui lui sera imposé et se restructurera pour la énième fois.

"Démotivant"

Les programmes d’investissements vitaux qui ont été suspendus par la force des choses suite aux mesures successives d’économies des dernières années, seront définitivement gelés !

Ces mesures d’économies imposées ne sont pas seulement démotivantes, car il y réside également un important danger avec des conséquences extrêmes pour le fonctionnement journalier de l’organisation ainsi que pour l’entraînement du personnel.

Il faudra encore attendre de voir si la réduction en personnel pourra se faire de manière socialement acceptable (par exemple via la prépension, une mesure que le nouveau gouvernement devra envisager). Dans le cas contraire, des licenciements secs ne sont en effet pas totalement exclus.

"Conséquences néfastes sur la crédibilité"

Je suis frappé qu’il y a deux mois à peine, la Belgique promettait, à l’occasion du sommet de l’OTAN du Pays de Galles, de ne pas continuer à diminuer son budget de la Défense, alors que les décisions politiques prises dernièrement témoignent exactement du contraire. Ceci est incohérent et a des conséquences néfastes sur la crédibilité de la Belgique et sur notre politique de défense.

Depuis 2000 (quand la promesse d’un budget constant indexé a été faite), le budget de la Défense en termes constants n’a cessé de diminuer. Et, entre-temps, les dépenses dans d’autres départements augmentaient considérablement. Ceci fait toutefois penser à une politique d’extinction plutôt qu’à une sérieuse politique de défense qui fait défaut à notre pays.

"Nous nous sommes lourdement trompés"

Indépendamment de ces considérations budgétaires, il est grand temps que les politiciens se penchent sur notre politique de défense car nous (la Belgique, l’Europe et l’OTAN) nous sommes lourdement trompés dans notre évaluation de l’évolution de notre environnement sécuritaire.

En 2003, on a affirmé sous les applaudissements de tous que « l’Europe n’avait encore jamais été aussi prospère, aussi sûre et aussi libre ».

A l’époque déjà, nous aurions dû être plus attentifs aux chars que Poutine envoyait pour de « petits raids » chez des voisins désobéissants.

A l’époque déjà, nous aurions dû nous inquiéter des conséquences de l’invasion du Kosovo par l’OTAN et du soutien continu de la Russie à la Serbie.

A l’époque déjà, nous aurions pu nous apercevoir que la situation en Irak ou en Afghanistan n’allait pas pouvoir être maintenue durablement sous contrôle. A l’époque déjà, on mettait en avant le fait qu’on était loin d’en avoir fini avec Al Qaïda et ses partisans!

"Situation internationale loin d’être rassurante"

Il est très clair, pour tout qui veut le voir, qu’un bouleversement géostratégique fondamental se produit juste devant nous : une Russie pas si calme qui envahit la Crimée, avec des troubles dans le voisinage des pipelines qui nous approvisionnent en gaz naturel.

Et encore pour ne pas parler des nombreuses régions à problèmes dans l’arrière-cour de l’Europe et de l’autre côté de la Méditerranée. Et pour celui qui prend la peine de regarder plus loin que l’Europe et de suivre la situation en Extrême-Orient, il conclura rapidement que les événements qui s’y déroulent, sont loin d’être rassurants.

Dans ces circonstances, même en m’exprimant prudemment, il me semble que la Belgique ne peut se permettre de continuer à miner sa défense, la situation est grave.

En continuant à tailler dans la Défense, nous risquons aussi d’être fortement mis sous pression au niveau international, d’autant plus que nous sommes déjà depuis longtemps les resquilleurs dans le train de l’OTAN (et dans lequel n’embarquent pas les accompagnateurs). La solidarité n’est d’ailleurs pas un concept qui ne porte que sur des affaires sociales, mais aussi sur la sécurité via une alliance.

 "Les économies ont un caractère irréversible"

Ce qui m’inspire également de l’inquiétude, est l’ampleur des nouvelles économies imposées à la Défense. Après les restrictions budgétaires successives et inattendues sous les gouvernements Leterme et Di Rupo, toute l’élasticité pour absorber des économies temporaires, a disparu, de sorte que continuer à économiser structurellement implique que les conséquences seront plus lourdes et plus dures et qu’elles ont un caractère irréversible !

En outre, il faut aussi dire qu’il devient impossible de gérer la Défense d’une manière efficiente : avec une trajectoire budgétaire instable qui, lors de son exécution, change chaque année (et même plusieurs fois par an), il est en fait impossible de faire des choix pertinents en matière d’investissements pour une durée de 20 ans ou plus !

 "Tout a des limites"

La Défense a besoin de stabilité tant en termes de structures qu’en termes de budgets. Il est impossible de tenir un rythme au cours duquel les restructurations se succèdent de trop près. Les mesures prises dans le cadre d’une restructuration sont dépassées par les mesures des restructurations suivantes.

Cela, je l’ai déjà dit et écrit à l’époque à l’ancien formateur Di Rupo, au ministre et à toutes les autorités qui montraient de l’intérêt pour la Défense. Je ne doute pas que mon successeur ait aussi agi de même. Le fait que la Défense tienne encore le coup aujourd’hui, est surtout dû au professionnalisme, à l’énergie et à la créativité dont savent faire preuve, au quotidien, nos militaires, mais … tout a des limites !

J’espère que je me trompe avec mon analyse soutenant qu’il s’agit d’une politique d’extinction, mais je suis toujours dans l’attente de décisions politiques qui me contredisent.

Cordialement,

Général e.r. Delcour

Source: www.deredactie.be


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